03/05/2012
YPF et le maté, des symboles argentins
C’était dans l’air… Le gouvernement Kirchner a, courant avril, exproprié à hauteur de 51% l’espagnol REPSOL qui détenait la compagnie pétrolière argentine YPF. Accusant REPSOL de ne pas avoir suffisamment investi, obligeant ainsi le pays à devoir importer une grande quantité de pétrole, le gouvernement a donc décidé d’être offensif, encore une fois.
YPF qui avait été privatisé, sous Menem, dans les années 90, rentre à nouveau dans le giron de l’Etat. Ce coup d’éclat a bien sûr engendré de très nombreuses réactions. Dans la population argentine, c’est la joie et la fierté qui l’ont emporté, sous la bannière de la « souveraineté argentine ». Côté scène internationale, l’Argentine s’est à nouveau fait copieusement siffler… L’Union Européenne a estimé que l’action du gouvernement de Cristina Kirchner s’apparentait à un « tremblement de terre sur la scène entrepreneuriale internationale ».
En Argentine, on défend la légitimité de cette prise de pouvoir. Aujourd’hui le déficit énergétique argentin s’élève à 3 milliards de dollars et ce, alors même que le pays, recèle de quantités de ressources. REPSOL est ainsi présenté comme le grand coupable de cette dérive qui a conduit le pays à devenir importateur d’or noir. La question est bien sûr de savoir quels sont les moyens dont disposent le gouvernement pour financer tous les investissements nécessaires à une production intensive…
Cette question n’est cependant guère soulevée pour le moment, tant la campagne de communication orchestrée autour de l’expropriation a bien fonctionné. Des affiches innombrables de la Campora ont ainsi envahi les rues de Buenos Aires pour se féliciter de cette victoire argentine. La même Campora invitait la semaine dernière tous les Porteños à se retrouver au Stade Velez pour célébrer le rêve devenu réalité du couple Nestor-Cristina Kirchner. Et la Campora, c’est quoi ? Un mouvement de jeunes engagés politiquement dirigé par le fils Kirchner, Maximo, et ses amis, qui occupent désormais une place de choix dans le gouvernement.
Beaucoup de bruit qui réussit presque à couvrir l’inflation galopante… Toutefois, il y a quelques semaines, la situation a été sur le point de s’enflammer. Les prix du maté ont effet soudain violemment augmenté, du fait de la sécheresse qui a durement touché les producteurs de yerba maté. Conscient que la population n’apprécierait guère un renchérissement sévère de ce qui constitue l’un des éléments de son identité, le gouvernement est vite intervenu pour fixer des limites tarifaires. On achète bien le silence du peuple…
Décidément, l’Argentine vit une drôle de période...
05:50 Publié dans Economie argentine, Politique argentine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ypf, repsol, expropriation, maté, campora | Facebook | | |
15/03/2012
L’Argentine en voie de vénézuelisation ?
On sait que Cristina Kirchner entretient des liens cordiaux, avec son homologue Hugo Chavez. Au point de s’en inspirer très directement ? Hier, les gouverneurs des provinces du Chubut et de Santa Cruz, kirchnéristes convaincus, ont retiré à l’entreprise espagnole Repsol, 4 exploitations de gisement de pétrole.
Le pétrole, le point sensible de l’Argentine
L’Argentine, depuis plusieurs mois, met tout en œuvre pour équilibrer sa balance commerciale. On a déjà parlé ici de l’entrée en vigueur de la Declaracion Jurada Anticipada, mesure protectionniste, qui met les importateurs dans une situation extrêmement délicate, puisque les stocks pour l’heure ne rentrent plus ou au compte-goutte.
Voici que désormais le gouvernement s’attaque à la question de l’énergie. Il est vrai qu’en matière énergétique, l’Argentine est nettement déficitaire. En 2012, les importations énergétiques pourraient s’élever à 9 milliards de dollars.
Dès son investiture en octobre, Cristina avait pointé du doigt la chute de la production et les trop faibles niveaux d’investissement des entreprises pétrolières installées en Argentine. Hier, Repsol/ YPF en a donc fait les frais. Le gouverneur de Santa Cruz, Daniel Peralta, a ainsi affirmé : « Aujourd’hui, nous venons pour dire stop aux politiques qui nous ont conduits au chômage et à l’inégalité sociale, qui ont retiré des ressources aux provinces et aux municipalités. Aujourd’hui, les habitants de Chubut et de Santa Cruz, nous venons dire qu’il faut récupérer la souveraineté en matière d’énergie ». (source : El Pais)
Le lancinant problème d’YPF
YPF (Yacimientos petroliferas fiscales) a été créée en 1922. Cette entreprise publique argentine avait pour objectif l’exploitation des ressources pétrolières du pays. Dans les années 90, sous l’ère Menem marquée par un vaste mouvement de privatisation, YPF fut transformée tout d’abord en Société Anonyme, avant d’être totalement privatisée, à travers la vente à l’espagnol Repsol pour 9 milliards de dollars.
Pour la majorité des Argentins, YPF devrait retourner dans le giron national. Autant dire que la décision prise hier par les gouverneurs de Chubut et de Santa Cruz est donc extrêmement populaire…
Il reste à savoir comment les 2 provinces comptent opérer pour améliorer les niveaux de production sur les gisements retirés à Repsol.
Quelles sont les ressources naturelles de l’Argentine en matière d’énergie ?
L’Argentine dispose de plusieurs types de ressources naturelles, en matière énergétique :
- Des gisements de pétrole et de gaz. Les principaux gisements de pétrole argentins exploités aujourd’hui se trouvent dans le Nord-Ouest (NOA), à Cuyo, Neuquen, dans le Golf de san Jorge et en territoire austral.
- De puissants fleuves : Parana, Uruguay, … capables de produire de l’énergie hydroélectrique,
- Des régions extrêmement ensoleillées, telles que Cuyo, la Puna, la Cordillère orientale, aptes fournir de l’énergie solaire,
- Des zones très venteuses, comme l’immense Patagonie
- Un littoral avec de fortes amplitudes de marées qui permettraient la mise en œuvre d’énergie marémotrice
- Et enfin des volcans, qui peuvent être utilisés sous forme d’énergie géothermique
Il est à noter que l'énergie renouvelable ne semble pas une priorité argentine...En revanche, pour lutter contre le déficit énergétique, l’Argentine semble miser sur l’énergie nucléaire. La politique nucléaire de l’Argentine s’est développée à partir des années 50, avec la création de la Commission Nationale de l’Energie Atomique.
Il n’existe à l’heure actuelle que 2 centrales en Argentine : Atucha 1, dans la province de Buenos Aires, et Embalse, dans la province de Cordoba. Un projet Atucha 2 est en cours de construction, mais connaît de nombreux retours dus à des problèmes économiques et à la très ferme protestation de nombreux Argentins qui s’élèvent contre la construction d’une centrale près d’une ville de 14 millions d’habitants.
L'image internationale de l’Argentine bientôt ou déjà ternie ?
La décision des gouverneurs de Chubut et de Santa Cruz est une mesure particulièrement agressive. Repsol/ YPF a d’ailleurs annoncé que tous les moyens légaux seraient envisagés pour que cette annonce ne soit pas suivie des faits.
L’Argentine vit à l’heure actuelle un durcissement sévère de sa politique à l’égard des entreprises étrangères, souvent accusées de tous les maux. S’il est sans doute vrai que certaines ont pu spéculer contre le pays, ou contribuer à une évasion très significative de devises, on peut toutefois se demander si l’attitude très belliqueuse de Kirchner et de ses supporters sera in fine bénéfique au pays.
Dans un contexte déjà très marqué par les constantes déclarations et revendications sur les Malouines (dont il faut rappeler que le pétrole est l’un des enjeux), il y a fort à parier que l’image internationale de l’Argentine risque de se dégrader de manière sérieuse.
15:28 Publié dans Economie argentine, Politique argentine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ypf, repsol, chubut, santa cruz, déficit commercial, argentine, pétrole, malouines, atucha, ressources énergétiques | Facebook | | |