11/08/2014
Daniel Barenboim et Felipe Gonzalez réunis pour évoquer le Moyen-Orient et la musique
Hier soir étaient réunis au Teatro Colon le célèbre chef d’orchestre argentin et l’ancien président du gouvernement espagnol pour un « dialogue de musique et réflexion ». A travers leurs expériences personnelles, chacun est revenu sur le récent conflit à Gaza.
Leur légitimité à évoquer ce conflit est peut-être à rappeler. C’est sous le gouvernement de Felipe Gonzalez que l’Espagne a établi des liens diplomatiques avec Israël (l’Espagne de Franco ayant été résolument pro-arabe) ; le politicien est en outre un grand ami de Shimon Perez, et il a une connaissance fine des dessous des négociations de paix.
Quant à Daniel Barenboim, il œuvre depuis plusieurs décennies déjà pour le rapprochement entre Israéliens et Palestiniens. En 1999, il a ainsi conçu avec le philosophe Edward Said le projet d’orchestre du Divan, qui rassemble des musiciens israéliens, palestiniens et arabes.
Hier soir, c’est sans aucun doute Daniel Barenboim qui a eu les mots les plus justes pour évoquer le conflit. Tout tient, comme il le rappelait, à un manque de curiosité pour l’autre, pour le récit d’autrui. Très rapidement, se crée ainsi la figure du Monstre : cet étranger inconnu qui représente la menace ultime.
L’orchestre du Divan permet précisément d’humaniser le monstre, de le « démonstroïser », si on permet le néologisme. Mis côte à côte, un violoniste israëlien et un violoniste palestinien réalisent qu’ils affinent leur instrument de la même manière, qu’ils plaquent leur archet dans un même élan, qu’ils partagent la même recherche de la note exacte… Après 7h de répétition, le Monstre n’en est déjà plus un. Voici autrui, certes différent, mais aussi tellement ressemblant.
La paix entre Israëliens et Palestiniens n’est pas une utopie. Elle repose sur une meilleure connaissance mutuelle des deux peuples, mais pas seulement. Dans l’orchestre, les musiciens s’entendent parce qu’ils sont des égaux, et si l’orchestre fonctionne c’est grâce à la responsabilité de chaque musicien.
Or précisément, ces deux conditions ne sont pas respectées entre Israël et la Palestine : d’un côté, les Palestiniens subissent l’occupation de leurs territoires (d’où une inégalité de base); de l’autre, les deux peuples continuent de s’opposer avec trop de haine et d’incompréhension, sans comprendre la responsabilité de chacun dans le chemin vers une résolution pacifique et la plus juste possible.
Pour Felipe Gonzalez, la situation récente pourrait conduire à un désespoir total sur les possibilités de paix au Moyen-Orient, mais ce sont précisément des gestes et des moments symboliques qui peuvent encore faire croire à une solution. Et c’est la société civile, qui selon lui, sera sur le front…
Le concert donné par l’orchestre du Divan en 2005 à Ramallah a été de ce point de vue un événement majeur. Enfoncer des portes, donner de la voix, rassembler en musique… la portée symbolique du Divan est considérable. Mais seul, il ne peut tout faire.
Seul un vaste élan porté par les deux peuples, dans une perspective d’égalité et de justice, pourrait aboutir un jour à la cohabitation pacifique au Moyen-Orient.
15:57 Publié dans Economie argentine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : daniel barenboim, felipe gonzalez, orchestre du divan, gaza, west-easter diwan orchester | Facebook | | |
Les commentaires sont fermés.