20/10/2011
Freud, Lacan, Jung... & l'Argentine
L’Argentine n’est certes pas le berceau de la psychologie et de la psychanalyse, mais elle n’en est pas moins aujourd’hui l’un de ses terreaux les plus féconds. Selon un article de 2010 publié dans la Nación, le pays comptait 50 000 diplômés du cursus de psychologie, dont 38 000 pratiquaient leur métier à Buenos Aires. Preuve de l’importance des « psy » dans la capitale argentine, un des quartiers de la ville, autour de la Plaza Güemes, est surnommé « Villa Freud » ou « Palermo sensible », tant la densité des praticiens y est élevée.
Villa Freud
Par ailleurs, la faculté de psychologie de l’université de Buenos Aires comptabilisait en 2006 le chiffre faramineux de 16 706 étudiants inscrits. L’offre universitaire est à la mesure de la demande : il existe à Buenos Aires plus de facs de psychologie que de sciences dures et sur le territoire argentine, pas moins 150 cursus en psychologie sont dispensés. Ceci n’est pas sans irriter certains, tel que le physicien et philosophe Mario Bunge, auteur de l’article pré-cité paru dans la Nación. Il regrette amèrement l’engouement pour cette discipline qu’il estime si peu rigoureuse.
D’où vient donc cette « passion argentine » ? Pour Bunge, il faut remonter aux années 30, lorsque les kiosques du métro se mirent à vendre pour 3 francs six sous des œuvres de Freud. Selon le physicien, c’est à partir de là que s’abattit sur le pays une « nuit psychanalytique ».
Mais si Freud a tant plu, n’est-ce pas parce que la recherche de soi-même, la volonté de se comprendre font partie des gènes argentins? Pays d’immigrés européens, marqué par la question de l’identité ; pays à l’histoire complexe, instable, plongeant sa population dans l’incertitude quasi-permanente (qu’elle soit économique ou politique), l’Argentine offrait aux disciplines d’analyse de l’esprit un terrain conquis.
L’un des corollaires à l’engouement pour les disciplines « psy » est la place très importante des médecines dites parallèles en Argentine. Le pays est ainsi l’un des pionniers en ce qui concerne l’art-thérapie et la danse-thérapie.
Pour rebondir en conclusion sur les propos très négatifs de Mario Bunge à l’égard des disciplines « psy », il faut admettre que l’Argentine souffre d’un réel déficit en matière de recherche et développement industriel et technologique, ce qui constitue un vrai frein pour son développement économique.
Ne faut-il y voir l’un des effets du goût si prononcé pour l’analyse de l’esprit et la recherche du bient-être ?
Photo : le rayon psy à l'Ateneo
22:22 Publié dans Société argentine - questions sociales | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | |
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