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04/04/2013

Inondations à Buenos Aires : catastrophe naturelle… ou négligence politique ?

Si les conséquences n’avaient pas été si dramatiques, les inondations de ces derniers jours auraient pu ne donner lieu ici qu’à un simple coup de gueule. Mais avec 6 morts à Buenos Aires et 46 à La Plata, ville située à 60 kms de la capitale, il est impossible de faire une note uniquement énervée ou ironique. 

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A intervalles relativement réguliers, de fortes pluies viennent frapper la région de l'estuaire du Rio de la Plata. A Buenos Aires, les quartiers les plus concernés sont Palermo, Belgrano, Saavedra, ou encore Villa Crespo et Boca. Les télévisions diffusent alors en boucles des images d'eau envahissant les rues, de boutiques perdant leur marchandise, de véhicules prenant l’eau, ou d'immeubles et maisons se retrouvant les pieds mouillés… L’habitude est telle, que règne ici une certaine résignation.

Mais cette fois-ci le scénario est quelque peu différent. Tout d’abord, les pluies qui se sont abattues sur Capital Federal dans la nuit de lundi à mardi ont fait 6 morts ; puis, près d’une demi-journée plus tard, c’est la ville de la Plata (900 000 habitants) située à l’ouest de Buenos Aires qui a subi de plein fouet 4h de pluies interrompues.

Il faut préciser ici qu’il ne s’agissait pas d’une tempête, ni d’un ouragan. Les services météorologiques ont estimé que pendant les deux premières heures, sont tombés 40 centimètres d’eau. S’il s’agit certes d’une très importante quantité d’eau, cela ne semble pas être un niveau insurmontable… si la ville y est préparée.

Et c’est bien ce qui pèche ici. Si, certes, il est possible de s’en prendre au changement climatique, qui semble avoir accéléré les fortes pluies dans cette région d’Argentine depuis quelques années, il faut aussi avoir les facteurs humains. Et ils ne sont pas minimes. Très loin de là.

Le problème de l’évacuation de l’eau est un problème majeur dans Buenos Aires et sa province. La capitale s’est ainsi construite de manière très chaotique, sans plan d’urbanisation, sans réflexion sur l’implantation de l’habitat, ni sur les infrastructures à mettre en œuvre pour que les eaux pluviales puissent être absorbées, sans créer de manière systématique des inondations.

L’une des autres causes très fréquemment déplorées est liée aux poubelles. La gestion des ordures à Buenos Aires est l’une des plus mauvaises qui soient. Il n’existe ni bennes publiques, ni bennes privées (d’immeubles). Résultat : tous les habitants déposent leurs sacs plastiques le soir dans la rue, juste avant le passage des éboueurs… ou à un autre moment de la journée, s’ils veulent se débarrasser de leurs sacs poubelle. Or à la moindre grosse pluie, ces sacs finissent par dériver et obstruer les bouches d’égout. Doit-on ici pointer du doigt les habitants qui sortent leurs poubelles quand bon leur chante (et cela n’est pas si fréquent que cela) ou déplorer la catastrophique organisation des déchets dans une ville de cette taille ?

En ce qui concerne la Plata, il est évident qu’il s’est agi là de précipitations violentes. Toutefois, on peut se demander pourquoi dans une ville où les inondations sont habituelles, aucune mesure significative n’a jamais été prise pour y remédier

 

>> En savoir plus : la question des inondations dans Buenos Aires et sa province est depuis très longtemps l’objet d’études et de réflexions. En 1999, la Fundacion Ciuadad avait ainsi réuni un forum baptisé « L’eau à Buenos Aires » ; une synthèse y présentait les causes principales des inondations.

>> En 2010, Antonio Elio Brailovsky publiait l’ouvrage « Buenos Aires, ville inondable ». Cet auteur critique notamment l’usage à tort par les politiques du terme « catastrophe naturelle »… quand la catastrophe vient avant tout de l’urbanisation.

>> Une étude de l’université de la Plata a recensé 25 inondations dans la décennie 70-80 dans la ville de la Plata… Sur la période 80-2000, le nombre d’inondations avait atteint 78. Aussi dramatique qu’elle soit, l’inondation de ce mois d’avril 2013 ne fait donc que s’inscrire dans une série d’inondations, dont le nombre ne cesse de s’élever.