24/02/2013
En Argentine, les syndicats font tirer sur les défenseurs des ouvriers… (cherchez l’erreur)
On voit son visage sur de nombreux murs de la ville. Et des revendications, des cris de justice. Il s’appelait Mariano Ferreyra, il avait 23 ans. Il est mort en octobre 2010 pour avoir défendu les droits des ouvriers « tertiarisés » travaillant pour les chemins de fer de la ligne Roca, à Buenos Aires.
La mort de ce jeune leader de la Fédération Universitaire de Buenos Aires avait considérablement secoué l’Argentine, et elle ne laisse encore d’aujourd’hui de stupéfier et bouleverser. Jugé actuellement au tribunal de Comodoro Py, l'affaire « Mariano Ferreyra » connaîtra dans les semaines à venir son verdict.
Les circonstances de la mort de cet étudiant engagé révèle l’incroyable complexité du système politique et syndical argentin, et jette un jour sordide sur la politique répressive menée par les dirigeants syndicaux, appuyés par la police fédérale.
En octobre 2010, des manifestations commencèrent au sein des chemins de fer d’Avellanada (un quartier de Buenos Aires) pour lutter la tertiarisation de l’emploi. Plutôt que de recruter en interne, les chemins de fer préféraient en effet faire appel à des intérimaires ou des sous-traitants, créant ainsi une forte précarité de l’emploi.
Pour se faire entendre, les manifestants soutenus par le parti ouvrier (Partido obrero) , décidèrent de bloquer les voies. Ceci ne fut pas du goût ni des syndicats ferroviaires - en premier lieu du puissant UF (Union ferroviara), qui n’entendait pas voir remises en cause ses décisions de stratégie de gestion-, ni de l’Etat, qui envoya rapidement la police fédérale contrer les manifestants.
Le 20 octobre 2010, alors que Ferreyra manifestait une nouvelle fois aux côtés des ouvriers tertiarisés, une balle le toucha en plein thorax, entraînant quelques heures plus tard son décès. Très rapidement furent pointés du doigt, d’une part les membres d’un gang ("patota") de l’Union Ferroviaire, des hooligans appelés ici "barrabravas", mais également la police fédérale qui n’aurait rien fait pour empêcher les exactions de ce groupe.
Aujourd’hui sont sur le banc des accusés José Pedraza, alors dirigeant de l’UF, le commissaire de police Lompizano, les « barrabravas » auteurs présumés des tirs, ainsi que des cheminots présents sur les lieux qui auraient empêché une équipe de télévision de filmer lors de l’attaque de la « patota ».
Selon la défense, Pedraza avait un intérêt personnel dans la tertiarisation des emplois (il aurait été lui-même patron d’une entreprise sous-traitante et aurait eu des liens dans une autre).
La défense, au nom du CELS (Centro de estudios legales y sociales), a demandé la perpétuité contre José Pedraza.
Le cas Mariano Ferreyra fait particulièrement froid dans le dos : il prouve la corruption totale, d'une part de la police fédérale et questionne ainsi le rôle du gouvernement Kirchner ; et d’autre part, des très puissants syndicats argentins (leur leader charismatique, dirigeant de la CGT, Hugo Moyano, traînant des scandales sensationnels derrière lui).
Il reste à voir comment la justice argentine tranchera dans ce procès…
En décembre dernier, celle-ci s’était à nouveau fait remarquer, lors du verdict dans l’affaire Marita Veron, une jeune femme enlevée par un réseau de traite des blanches dans la province de Tucuman en 2002.
La défense organisée par la mère de la jeune femme avait réuni en l’espace de 10 ans un monceau de preuves contre des réseaux tout à fait identifiés : les magistrats de Tucuman les ont tous acquittés. Sans commentaire...
00:33 Publié dans Société argentine - questions sociales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mariano ferreyra, affaire mariano ferreyra, union ferroviaria, syndicats argentins, police fédérale, josé pedraza, affaire marita veron, traite des blanches, justice argentine | Facebook | | |
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